Solution pour les concepteurs >

Choix de conception

Tout déplier

Contexte et enjeux

La conception d’un projet architectural avec des brasseurs d’air plafonniers, généralement et idéalement au terme d’une approche de conception éco-responsable, doit faire l’objet d’une démarche rigoureuse et cohérente en lien aussi bien avec l’architecture du projet, ses atouts et contraintes diverses, qu’avec des occupants, qui sont les bénéficiaires de ces équipements mais qui en sont aussi les utilisateurs / pilotes.

Trop de projets, parfois pourtant bien conçus sur le plan de la cohérence écologique de leur architecture, notamment des projets très bioclimatiques, ont pêché par une sous-estimation de l’importance du nombre de détails conceptuels et constructifs qui sont à maîtriser pour que l’installation de brasseurs d’air, dispositifs frugaux par excellence de création de « brises artificielles basse énergie », apporte l’amélioration de bien-être qu’on est en droit d’en attendre.

En effet, les brasseurs d’air tolèrent encore moins que d’autres équipements techniques liés au bâti une approximation conceptuelle qui consiste à les plaquer dans un espace bâti, sans réflexion amont et multi-disciplinaire sur l’interaction de cette technique simple mais exigeante avec d’autres composants de l’enveloppe.

Ce texte introduit le sujet des choix conceptuels et constructifs à effectuer pour l’installation de BAP qui garantissent qu’ils seront, dans une architecture bioclimatique et/ou énergétiquement efficace, des vecteurs performants et « basse- technologie » du bien-être thermique à très faible impact écologique, y compris dans les climats les plus thermiquement contraignants en raison de la forte hygrométrie comme, par exemple, la Guyane.

Cette partie est complémentaire des thématiques abordées plus en détail dans les autres parties, notamment à propos des performances des installations, des règles de l’art de mise en œuvre, de calepinage de ces équipements ou encore des questions d’ancrage.

DĂ©marche conceptuelle brasseurs d’air (bâtiments neufs)

La conception d’une architecture performante avec des brasseurs d’air doit être anticipée dès l’avant- projet, notamment parce qu’elle interfère avec la conception structurelle du bâtiment et avec les questions de traitement des ambiances thermiques, lumineuses et acoustiques. Elle doit donc mobiliser transversalement de nombreuses compétences complémentaires de la co-conception. Très tôt,

on devra se poser la question de l’ampleur de l’utilisation de brasseurs d’air dans un projet pour toutes les typologies architecturales, neuves ou à réhabiliter, tellement le potentiel d’alternative totale ou partielle des brasseurs d’air à la climatisation est énorme.

Dans tous les cas, il est important d’avoir à l’esprit les préoccupations suivantes :

  • les brasseurs d’air n’ont de sens qu’en appui Ă  une architecture bioclimatique (protĂ©gĂ©e et ventilĂ©e) et/ou efficace (protĂ©gĂ©e et Ă©quipĂ©e de climatisation performante) ;
  • ils concernent aussi bien les bâtiments neufs que les enveloppes Ă  rĂ©habiliter ;
  • ils concernent toutes les typologies y compris les plus difficiles Ă  traiter (bureaux, autres bâtiments tertiaires) dès lors que les problèmes environnementaux du site (bruit, nuisances olfactives diverses,…) sont maĂ®trisĂ©s ;
  • ils peuvent ĂŞtre installĂ©s aussi dans les espaces qui seront climatisĂ©s, avec un potentiel de rĂ©duction significatif Ă  la fois du nombre d’heures de fonctionnement de la climatisation et de ses consignes de fonctionnement. Ainsi, on pourra rĂ©gler le thermostat d’une climatisation Ă  27°C ou 28°C ce qui sollicitera moins le compresseur, tandis que le brasseur d’air ramènera la tempĂ©rature ressentie Ă  25°C ou 26°C. MĂŞme dans les bâtiments oĂą la climatisation est demandĂ©e explicitement dans le programme, il peut ĂŞtre envisagĂ© de dĂ©roger partiellement Ă  cette règle dans diverses zones du bâtiment dès lors qu’on est capable d’apporter une argumentation solide sur la garantie du confort apportĂ© aux occupants.

Très tôt dans le projet, il faudra également se poser la question du « lot technique » auquel ces équipements doivent être affectés dans le PRO/ DCE du projet : nous proposons qu’ils soient essentiellement prescrits au lot « électricité » plutôt qu’au lot « CVC » lorsqu’il existe, notamment pour des raisons de continuité et d’interface avec l’éclairage du local.

La conception d’une architecture performante avec des brasseurs d’air doit être anticipée dès l’avant- projet. Exemple avec la résidence Maldyves (architecte L. DARVIOT)
Guadeloupe
RĂ©sidence Maldyves (architecte L. DARVIOT)
Guadeloupe

Conception et dimensionnement

La conception d’un projet de brasseurs d’air, avant la sélection du matériel, de ses caractéristiques techniques et performancielles ainsi que de mise en œuvre et de calepinage est avant tout spatiale et liée à l’usage de la pièce.

Il s’agira de définir, d’abord en plan, les zones qui sont à ventiler notamment les zones de sédentarité dans l’espace, qu’elles soient fixes ou variables :

  • les zones de circulation ou purement logistiques (dessus d’armoires, placards, rangements,..) pourront avantageusement ĂŞtre sorties de la zone de brassage afin de rĂ©duire le nombre de brasseurs d’air et /ou de concentrer leur impact au plus près des occupants ;
  • les brasseurs d’air seront positionnĂ©s idĂ©alement au dessus des zones « sĂ©dentaires » si ces zones sont figĂ©es dans l’espace en raison de ses contraintes dimensionnelles ou d’usage (cas d’une petite chambre oĂą une seule zone est possible pour le positionnement du lit ou d’une salle de rĂ©union oĂą la position de la table de rĂ©union est centrĂ©e,..)
  • ces brasseurs d’air seront, au contraire, centrĂ©s dans un petit espace nĂ©cessitant un seul brasseur d’air et qui n’a pas d’usage zonĂ© ou encore rĂ©partis Ă©quitablement selon les règles de dimensionnement dont quelques recommandations sont donnĂ©es ci-après, dans des espaces Ă  usage diffus (salles de classe, salle de spectacle, salle de sport, etc.)

Le choix des modèles de brasseurs d’air, en termes de matérialité et de couleur, se fera souvent sur la base de considérations esthétiques en lien avec l’aménagement global de l’espace car manifestement les brasseurs d’air sont des objets techniques particulièrement voyants. Ils doivent donc absolument être co-sélectionnés à la fois par l’architecte et le maître d’ouvrage et/ou le maître d’usage en même temps qu’ils devront être pré- sélectionnés par le référent énergie/environnement de l’équipe de maitrise d’œuvre aussi bien sur le plan performanciel qu’en termes de cohérence écologique globale.

Brasseurs d'air plafonniers - École Jean Moulin, Miramas
École Jean Moulin, Miramas – © Inddigo

Ainsi, les points suivants doivent être notamment regardés :

  • l’efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique spĂ©cifique du brasseur qui mesure le « service rendu » (son dĂ©bit) par unitĂ© de puissance absorbĂ©e et payĂ©e (le W) : cette valeur exprimĂ©e donc en m3/h/W ou encore en m3/(Wh) doit ĂŞtre la plus Ă©levĂ©e possible en fonction de la technologie (BAP Ă  courant alternatif ou BAP Ă  courant continu) et des valeurs seuils qui sont donnĂ©es dans la partie 8 ;
  • le matĂ©riau de fabrication doit ĂŞtre le plus durable possible : on privilĂ©giera des brasseurs d’air en bois Ă©co-certifiĂ© et traçable ou encore en mĂ©tal inoxydable (Ă©viter absolument l’acier laquĂ© dans les DOM) plutĂ´t que des modèles en matĂ©riau plastique bien que ceux-ci aient Ă©galement l’avantage de la lĂ©gèretĂ© ;
  • Ă©ventuellement l’origine gĂ©ographique de fabrication ;
  • la durĂ©e de garantie, qui devra excĂ©der 10 ans et qui est parfois illimitĂ©e pour le moteur, ainsi que le marquage CE qui est obligatoire ;
  • la tropicalisation des moteurs est essentielle (outdoor version damp ou Ă©galement IP44), d’autant plus pour des usages en extĂ©rieur et protĂ©gĂ© des intempĂ©ries (terrasse, loggia, varangue…) ;
  • divers dĂ©tails techniques et performanciels essentiels dont notamment la puissance Ă  l’arrĂŞt qui devrait ĂŞtre infĂ©rieure ou Ă©gale Ă  0,2 W.

Ratios de dimensionnement

En termes de pré-dimensionnement, on pourra utiliser les règles suivantes :

  • SĂ©lectionner des brasseurs d’air de diamètre de 132 cm (52 pouces) minimum mais privilĂ©gier les grands modèles (plus de 150 cm).

Le ratio de base de dimensionnement est 1 BAP pour 10 à 20 m² de surface utile de plancher : un brasseur d’air de diamètre 132 suffira pour une pièce de 10 m2 tandis qu’on emploiera un modèle de diamètre 180 pour une pièce de 20 m2

On entend ici par surface utile, les zones effectivement utilisĂ©es et recevant des occupants (salariĂ©s, collaborateurs, Ă©lèves, habitants visiteurs, utilisateurs…).

On exclura les espaces sans occupants permanents (les zones de circulation, les sanitaires, ou encore les dépôts et entrepôts par exemple), qui ne recevront des brasseurs d’air que s’ils ont occupés en permanence par des employés de logistique ou de vente.

Pour les pièces de grande dimension, nous proposons un outil de type tableur de pré-dimensionnement qui devra être utilisé en tenant aussi compte des règles de calepinage présentées dans la partie 9 par rapport aux contraintes de structure et d’usage.

Enfin, pour des projets ou des géométries plus complexes, les outils fournis par l’université de Berkeley ou des CFD peuvent être utiles.

Les règles suivantes de pré-dimensionnement pourront donc être utilisées :

PièceDiamètre modèle (cm) à privilégierDiamètre en poucesNombreRemarques
Chambre ou bureau
< 10 m2
132521centre de la pièce
Chambre ou bureau
< 15 m2
150~160~ 601centre de la pièce
Salle de classe
< 50 m2
150~ 604 minicalepinage essentiel
Salle de classe
< 70 m2
150~160~ 606calepinage essentiel
Salle polyvalente
< 100 m2
150~160~ 608calepinage essentiel

Hauteur de fonctionnement

Les implantations en hauteur font l’objet d’une rubrique spécifique, détaillant les conditions de sécurité et le fonctionnement aéraulique des brasseurs d’air.

Aspects techniques et réglementaires

Les prescriptions performancielles sont explicitées en détail dans la partie 8. Les points ci-après sont essentiels :

Alimentation Ă©lectrique

La mise en œuvre des brasseurs d’air devra respecter les spécifications techniques suivantes complétant les règles techniques générales EUROCODES et dans les DOM, les règles Antilles :

  • ConformitĂ© Ă©lectrique selon NF C15-100 : les brasseurs d’air seront câblĂ©s sur une alimentation spĂ©cifique distincte de l’éclairage.
  • DTU ventilation 68.3

Une note de calcul électrique spécifique devra détailler le dimensionnement de ce dispositif en phase PRO.

Il s’agira de prévoir des attentes électriques, protégées et repérées au tableau électrique, aux points d’alimentation définis ci-avant (à défaut de zonage d’usage ces alimentations seront centrées ou équi-réparties) avec au minimum une attente tous les 15 à 20 m2.

Pour les bâtiments existants, des dérogations sont justifiables sur l’absence d’une alimentation électrique dédiée, dans la mesure où les puissances mises en jeu sont comparables à celles des points lumineux.

Commandes

Il s’agit de prévoir des commandes soit individualisées, pour chaque brasseur d’air, soit groupées pour des trames d’usage homogène, permettant un fonctionnement discrétisé et donc plus économe de chaque brasseur d’air ou de chaque trame. Il paraît pertinent, dans tous les cas, de ne pas grouper plus de deux brasseurs d’air sur une seule commande.

Le choix de commandes se fera en privilégiant des modèles robustes à commande filaire et murale (interrupteur mural dûment repéré avec réglage de vitesse explicite).

Lorsque des télécommandes sont employées, elles peuvent constituer un maillon fragile (notamment dans la gestion des piles pour les bâtiments tertiaires).

Ces commandes devraient théoriquement, notamment dans les espaces publics ou scolaires, être protégées mécaniquement par un capotage, éventuellement sous clé. Ainsi, dans les salles de classe les commandes pourront être regroupées dans un coffret IP 20, manipulable par l’enseignant à proximité du tableau. et commandé par un interrupteur simple en entrée de salle.

Voir Ă©galement les extraits de CCTP inclus dans le guide pour la description des commandes.

En termes de régulation, on pourra aussi asservir le fonctionnement des brasseurs d’air à la présence des occupants : soit par une horloge programmée, soit par un détecteur de présence, mais ces fonctionnalités déresponsabilisent l’usager.

Essais

Il est important de prévoir que les brasseurs d’air fassent l’objet d’essais de
validations de performance (commande-régulation, débits à diverses vitesses, etc.) à la livraison du chantier en conditions réelles d’utilisation. Ces essais devront démontrer la capacité des BAP installés à créer une vitesse d’air de plus 0,5 m/s sur l’occupant situé dans la zone de confort (cf partie 8).


Les essais devront faire apparaître :

  • la distribution des vitesses d’air sur chaque palier de rĂ©glage de vitesse depuis l’axe de l’appareil, jusqu’à un rayon de 3 m (mesure tous les 50 cm) ;
  • les puissances Ă©lectriques absorbĂ©es sur chaque rĂ©glage de vitesse ;
  • l’absence d’oscillation trop importante ou de bruit parasite.

L’objectif des essais est également d’effectuer un réglage des vitesses lors de la livraison de l’équipement, en présence de l’installateur, du maître d’ouvrage ou de l’exploitant des locaux, et du BET fluides et de l’architecte.

Ceci est particulièrement important dans le cas des bâtiments tertiaires où les commandes ne sont pas accessibles aux usagers (élèves d’une salle de classe par exemple).

brasseurs d'air plafonniers  dans l'Ă©cole Jean Moulin Ă  Miramas.
École Jean Moulin, Miramas – © Inddigo

Impacts énergétiques et financiers

Un concepteur, même non énergéticien, est en mesure de calculer l’impact énergétique et financier d’un brasseur d’air.

Par exemple pour un bureau de 15 m2 situé aux Antilles ou en Guyane équipé d’un brasseur d’air de qualité, à courant continu de 28 W de puissance nominale, qui est en fonctionnement en grande vitesse pendant 7 heures par jour et 200 jours par an, la consommation électrique sera de 42 kWh/an.

La consommation spécifique sera de 2,8 kWh/an/m2

Cette valeur est à comparer à la consommation d’un climatiseur qui sera, aux Antilles, supérieure à 40 kWh/ m2/an dans un bâtiment thermiquement bien conçu.

On remarque que ces valeurs sont pessimistes pour les raisons suivantes :

  • le brasseur d’air ne sera pas sollicitĂ© tous les jours en permanence ;
  • il ne tournera pas toujours Ă  pleine vitesse.

S’il fonctionne en vitesse lente les consommations respectives pourront être aussi basses que 10 kWh/an et représenter 0,7 kWh/m2/an.

graphique consommation spécifiques (brasseurs d'air plafonniers et climatisation ) kWh/m²/an.

On retiendra comme ordre de grandeur une consommation spécifique de moins de 1 kWh/m2/an

Les dépenses correspondantes pour un kWh électrique à 0,15 €/kWh seront donc dérisoires et comprises entre 0,1 et 0,4 €/m2/an. Ces dépenses prévisionnelles, ramenées à l’échelle du bâtiment, devraient pouvoir être fournies au maitre d’ouvrage en phase conception, y compris en valeur comparée avec des solutions de confort avec climatisation.

Il faudrait bien évidemment rajouter à ce bilan financier les dépenses de fonctionnement et de gros entretien, mais sur cet aspect aussi la technologie frugale et robuste des brasseurs d’air les rend particulièrement économes.

En conclusion, si ces prescriptions sont respectées dans une architecture sensée, l’usage des brasseurs d’air constitue clairement une alternative à la fois qualitative, crédible, durable et éco-responsable à la climatisation, apportant du confort à bien moindre coût global.