Choix de conception
Contexte
Histoire des brasseurs d’air plafonniers
Les enjeux de sobriĂ©tĂ© et d’efficacitĂ© Ă©nergĂ©tique dans les territoires ultra-marins
Solution pour les concepteurs
Qu’est-ce que le confort thermique d’un bâtiment ?
Comment le brasseur d’air plafonnier apporte-t-il du confort ?
Implantation et positionnement dans l’espace
Prescriptions pour les maĂ®tres d’ouvrage et les maĂ®tres d’Ĺ“uvre
Règles de l’art pour les installateurs
Sécurité, risques sanitaires
Clés pour les utilisateurs
Traitements climatiques des espaces
Notions de coûts, aides publiques et primes EDF
Questions fréquentes
Qu’est-ce que le guide brise ?
Quelques idées reçues qui ont la vie dure !
Contexte et enjeux
La conception d’un projet architectural avec des brasseurs d’air plafonniers, généralement et idéalement au terme d’une approche de conception éco-responsable, doit faire l’objet d’une démarche rigoureuse et cohérente en lien aussi bien avec l’architecture du projet, ses atouts et contraintes diverses, qu’avec des occupants, qui sont les bénéficiaires de ces équipements mais qui en sont aussi les utilisateurs / pilotes.
Trop de projets, parfois pourtant bien conçus sur le plan de la cohérence écologique de leur architecture, notamment des projets très bioclimatiques, ont pêché par une sous-estimation de l’importance du nombre de détails conceptuels et constructifs qui sont à maîtriser pour que l’installation de brasseurs d’air, dispositifs frugaux par excellence de création de « brises artificielles basse énergie », apporte l’amélioration de bien-être qu’on est en droit d’en attendre.
En effet, les brasseurs d’air tolèrent encore moins que d’autres équipements techniques liés au bâti une approximation conceptuelle qui consiste à les plaquer dans un espace bâti, sans réflexion amont et multi-disciplinaire sur l’interaction de cette technique simple mais exigeante avec d’autres composants de l’enveloppe.
Ce texte introduit le sujet des choix conceptuels et constructifs à effectuer pour l’installation de BAP qui garantissent qu’ils seront, dans une architecture bioclimatique et/ou énergétiquement efficace, des vecteurs performants et « basse- technologie » du bien-être thermique à très faible impact écologique, y compris dans les climats les plus thermiquement contraignants en raison de la forte hygrométrie comme, par exemple, la Guyane.
Cette partie est complémentaire des thématiques abordées plus en détail dans les autres parties, notamment à propos des performances des installations, des règles de l’art de mise en œuvre, de calepinage de ces équipements ou encore des questions d’ancrage.
DĂ©marche conceptuelle brasseurs d’air (bâtiments neufs)
La conception d’une architecture performante avec des brasseurs d’air doit être anticipée dès l’avant- projet, notamment parce qu’elle interfère avec la conception structurelle du bâtiment et avec les questions de traitement des ambiances thermiques, lumineuses et acoustiques. Elle doit donc mobiliser transversalement de nombreuses compétences complémentaires de la co-conception. Très tôt,
on devra se poser la question de l’ampleur de l’utilisation de brasseurs d’air dans un projet pour toutes les typologies architecturales, neuves ou à réhabiliter, tellement le potentiel d’alternative totale ou partielle des brasseurs d’air à la climatisation est énorme.
Dans tous les cas, il est important d’avoir à l’esprit les préoccupations suivantes :
- les brasseurs d’air n’ont de sens qu’en appui à une architecture bioclimatique (protégée et ventilée) et/ou efficace (protégée et équipée de climatisation performante) ;
- ils concernent aussi bien les bâtiments neufs que les enveloppes à réhabiliter ;
- ils concernent toutes les typologies y compris les plus difficiles à traiter (bureaux, autres bâtiments tertiaires) dès lors que les problèmes environnementaux du site (bruit, nuisances olfactives diverses,…) sont maîtrisés ;
- ils peuvent être installés aussi dans les espaces qui seront climatisés, avec un potentiel de réduction significatif à la fois du nombre d’heures de fonctionnement de la climatisation et de ses consignes de fonctionnement. Ainsi, on pourra régler le thermostat d’une climatisation à 27°C ou 28°C ce qui sollicitera moins le compresseur, tandis que le brasseur d’air ramènera la température ressentie à 25°C ou 26°C. Même dans les bâtiments où la climatisation est demandée explicitement dans le programme, il peut être envisagé de déroger partiellement à cette règle dans diverses zones du bâtiment dès lors qu’on est capable d’apporter une argumentation solide sur la garantie du confort apporté aux occupants.
Très tôt dans le projet, il faudra également se poser la question du « lot technique » auquel ces équipements doivent être affectés dans le PRO/ DCE du projet : nous proposons qu’ils soient essentiellement prescrits au lot « électricité » plutôt qu’au lot « CVC » lorsqu’il existe, notamment pour des raisons de continuité et d’interface avec l’éclairage du local.
Conception et dimensionnement
La conception d’un projet de brasseurs d’air, avant la sélection du matériel, de ses caractéristiques techniques et performancielles ainsi que de mise en œuvre et de calepinage est avant tout spatiale et liée à l’usage de la pièce.
Il s’agira de définir, d’abord en plan, les zones qui sont à ventiler notamment les zones de sédentarité dans l’espace, qu’elles soient fixes ou variables :
- les zones de circulation ou purement logistiques (dessus d’armoires, placards, rangements,..) pourront avantageusement être sorties de la zone de brassage afin de réduire le nombre de brasseurs d’air et /ou de concentrer leur impact au plus près des occupants ;
- les brasseurs d’air seront positionnés idéalement au dessus des zones « sédentaires » si ces zones sont figées dans l’espace en raison de ses contraintes dimensionnelles ou d’usage (cas d’une petite chambre où une seule zone est possible pour le positionnement du lit ou d’une salle de réunion où la position de la table de réunion est centrée,..)
- ces brasseurs d’air seront, au contraire, centrés dans un petit espace nécessitant un seul brasseur d’air et qui n’a pas d’usage zoné ou encore répartis équitablement selon les règles de dimensionnement dont quelques recommandations sont données ci-après, dans des espaces à usage diffus (salles de classe, salle de spectacle, salle de sport, etc.)
Le choix des modèles de brasseurs d’air, en termes de matérialité et de couleur, se fera souvent sur la base de considérations esthétiques en lien avec l’aménagement global de l’espace car manifestement les brasseurs d’air sont des objets techniques particulièrement voyants. Ils doivent donc absolument être co-sélectionnés à la fois par l’architecte et le maître d’ouvrage et/ou le maître d’usage en même temps qu’ils devront être pré- sélectionnés par le référent énergie/environnement de l’équipe de maitrise d’œuvre aussi bien sur le plan performanciel qu’en termes de cohérence écologique globale.
Ainsi, les points suivants doivent être notamment regardés :
- l’efficacité énergétique spécifique du brasseur qui mesure le « service rendu » (son débit) par unité de puissance absorbée et payée (le W) : cette valeur exprimée donc en m3/h/W ou encore en m3/(Wh) doit être la plus élevée possible en fonction de la technologie (BAP à courant alternatif ou BAP à courant continu) et des valeurs seuils qui sont données dans la partie 8 ;
- le matériau de fabrication doit être le plus durable possible : on privilégiera des brasseurs d’air en bois éco-certifié et traçable ou encore en métal inoxydable (éviter absolument l’acier laqué dans les DOM) plutôt que des modèles en matériau plastique bien que ceux-ci aient également l’avantage de la légèreté ;
- éventuellement l’origine géographique de fabrication ;
- la durée de garantie, qui devra excéder 10 ans et qui est parfois illimitée pour le moteur, ainsi que le marquage CE qui est obligatoire ;
- la tropicalisation des moteurs est essentielle (outdoor version damp ou Ă©galement IP44), d’autant plus pour des usages en extĂ©rieur et protĂ©gĂ© des intempĂ©ries (terrasse, loggia, varangue…) ;
- divers détails techniques et performanciels essentiels dont notamment la puissance à l’arrêt qui devrait être inférieure ou égale à 0,2 W.
Ratios de dimensionnement
En termes de pré-dimensionnement, on pourra utiliser les règles suivantes :
- Sélectionner des brasseurs d’air de diamètre de 132 cm (52 pouces) minimum mais privilégier les grands modèles (plus de 150 cm).
Le ratio de base de dimensionnement est 1 BAP pour 10 à 20 m² de surface utile de plancher : un brasseur d’air de diamètre 132 suffira pour une pièce de 10 m2 tandis qu’on emploiera un modèle de diamètre 180 pour une pièce de 20 m2
On entend ici par surface utile, les zones effectivement utilisĂ©es et recevant des occupants (salariĂ©s, collaborateurs, Ă©lèves, habitants visiteurs, utilisateurs…).
On exclura les espaces sans occupants permanents (les zones de circulation, les sanitaires, ou encore les dépôts et entrepôts par exemple), qui ne recevront des brasseurs d’air que s’ils ont occupés en permanence par des employés de logistique ou de vente.
Pour les pièces de grande dimension, nous proposons un outil de type tableur de pré-dimensionnement qui devra être utilisé en tenant aussi compte des règles de calepinage présentées dans la partie 9 par rapport aux contraintes de structure et d’usage.
Enfin, pour des projets ou des géométries plus complexes, les outils fournis par l’université de Berkeley ou des CFD peuvent être utiles.
Les règles suivantes de pré-dimensionnement pourront donc être utilisées :
Pièce | Diamètre modèle (cm) à privilégier | Diamètre en pouces | Nombre | Remarques |
Chambre ou bureau < 10 m2 | 132 | 52 | 1 | centre de la pièce |
Chambre ou bureau < 15 m2 | 150~160 | ~ 60 | 1 | centre de la pièce |
Salle de classe < 50 m2 | 150 | ~ 60 | 4 mini | calepinage essentiel |
Salle de classe < 70 m2 | 150~160 | ~ 60 | 6 | calepinage essentiel |
Salle polyvalente < 100 m2 | 150~160 | ~ 60 | 8 | calepinage essentiel |
Hauteur de fonctionnement
Les implantations en hauteur font l’objet d’une rubrique spécifique, détaillant les conditions de sécurité et le fonctionnement aéraulique des brasseurs d’air.
Aspects techniques et réglementaires
Les prescriptions performancielles sont explicitées en détail dans la partie 8. Les points ci-après sont essentiels :
Alimentation Ă©lectrique
La mise en œuvre des brasseurs d’air devra respecter les spécifications techniques suivantes complétant les règles techniques générales EUROCODES et dans les DOM, les règles Antilles :
- Conformité électrique selon NF C15-100 : les brasseurs d’air seront câblés sur une alimentation spécifique distincte de l’éclairage.
- DTU ventilation 68.3
Une note de calcul électrique spécifique devra détailler le dimensionnement de ce dispositif en phase PRO.
Il s’agira de prévoir des attentes électriques, protégées et repérées au tableau électrique, aux points d’alimentation définis ci-avant (à défaut de zonage d’usage ces alimentations seront centrées ou équi-réparties) avec au minimum une attente tous les 15 à 20 m2.
Pour les bâtiments existants, des dérogations sont justifiables sur l’absence d’une alimentation électrique dédiée, dans la mesure où les puissances mises en jeu sont comparables à celles des points lumineux.
Commandes
Il s’agit de prévoir des commandes soit individualisées, pour chaque brasseur d’air, soit groupées pour des trames d’usage homogène, permettant un fonctionnement discrétisé et donc plus économe de chaque brasseur d’air ou de chaque trame. Il paraît pertinent, dans tous les cas, de ne pas grouper plus de deux brasseurs d’air sur une seule commande.
Le choix de commandes se fera en privilégiant des modèles robustes à commande filaire et murale (interrupteur mural dûment repéré avec réglage de vitesse explicite).
Lorsque des télécommandes sont employées, elles peuvent constituer un maillon fragile (notamment dans la gestion des piles pour les bâtiments tertiaires).
Ces commandes devraient théoriquement, notamment dans les espaces publics ou scolaires, être protégées mécaniquement par un capotage, éventuellement sous clé. Ainsi, dans les salles de classe les commandes pourront être regroupées dans un coffret IP 20, manipulable par l’enseignant à proximité du tableau. et commandé par un interrupteur simple en entrée de salle.
Voir Ă©galement les extraits de CCTP inclus dans le guide pour la description des commandes.
En termes de régulation, on pourra aussi asservir le fonctionnement des brasseurs d’air à la présence des occupants : soit par une horloge programmée, soit par un détecteur de présence, mais ces fonctionnalités déresponsabilisent l’usager.
Essais
Il est important de prévoir que les brasseurs d’air fassent l’objet d’essais de
validations de performance (commande-régulation, débits à diverses vitesses, etc.) à la livraison du chantier en conditions réelles d’utilisation. Ces essais devront démontrer la capacité des BAP installés à créer une vitesse d’air de plus 0,5 m/s sur l’occupant situé dans la zone de confort (cf partie 8).
Les essais devront faire apparaître :
- la distribution des vitesses d’air sur chaque palier de réglage de vitesse depuis l’axe de l’appareil, jusqu’à un rayon de 3 m (mesure tous les 50 cm) ;
- les puissances électriques absorbées sur chaque réglage de vitesse ;
- l’absence d’oscillation trop importante ou de bruit parasite.
L’objectif des essais est également d’effectuer un réglage des vitesses lors de la livraison de l’équipement, en présence de l’installateur, du maître d’ouvrage ou de l’exploitant des locaux, et du BET fluides et de l’architecte.
Ceci est particulièrement important dans le cas des bâtiments tertiaires où les commandes ne sont pas accessibles aux usagers (élèves d’une salle de classe par exemple).
Impacts énergétiques et financiers
Un concepteur, même non énergéticien, est en mesure de calculer l’impact énergétique et financier d’un brasseur d’air.
Par exemple pour un bureau de 15 m2 situé aux Antilles ou en Guyane équipé d’un brasseur d’air de qualité, à courant continu de 28 W de puissance nominale, qui est en fonctionnement en grande vitesse pendant 7 heures par jour et 200 jours par an, la consommation électrique sera de 42 kWh/an.
La consommation spécifique sera de 2,8 kWh/an/m2
Cette valeur est à comparer à la consommation d’un climatiseur qui sera, aux Antilles, supérieure à 40 kWh/ m2/an dans un bâtiment thermiquement bien conçu.
On remarque que ces valeurs sont pessimistes pour les raisons suivantes :
- le brasseur d’air ne sera pas sollicité tous les jours en permanence ;
- il ne tournera pas toujours Ă pleine vitesse.
S’il fonctionne en vitesse lente les consommations respectives pourront être aussi basses que 10 kWh/an et représenter 0,7 kWh/m2/an.
On retiendra comme ordre de grandeur une consommation spécifique de moins de 1 kWh/m2/an
Les dépenses correspondantes pour un kWh électrique à 0,15 €/kWh seront donc dérisoires et comprises entre 0,1 et 0,4 €/m2/an. Ces dépenses prévisionnelles, ramenées à l’échelle du bâtiment, devraient pouvoir être fournies au maitre d’ouvrage en phase conception, y compris en valeur comparée avec des solutions de confort avec climatisation.
Il faudrait bien évidemment rajouter à ce bilan financier les dépenses de fonctionnement et de gros entretien, mais sur cet aspect aussi la technologie frugale et robuste des brasseurs d’air les rend particulièrement économes.
En conclusion, si ces prescriptions sont respectées dans une architecture sensée, l’usage des brasseurs d’air constitue clairement une alternative à la fois qualitative, crédible, durable et éco-responsable à la climatisation, apportant du confort à bien moindre coût global.